L'histoire : Il
n'y a pas que sur les champs de bataille que sévit la Grande
Guerre. Sur les collines aussi, dans cette paix apparente faite
de soleil et de campagne, on pille l'existence des familles qui
attendent une fils, un mari, un père. On réquisitionne les
troupeaux, on fait mourir les bêtes dans de trop longs voyages,
on se désespère de ces vies qui ont été retirées, cette
chair qui emplissait les champs et les prairies. Julia se
languit de son mari Joseph, Madeleine de son amant Olivier. Les
deux hommes livrent des batailles qu'ils ne comprennent jamais,
marchent de place en place, aveuglément, et regardent leurs
camarades tomber autour d'eux. Les deux femmes poursuivent
seules leur existence de labeur, guettent chaque jour le
courrier venu du front et lancent un regard amer à la place
vide du lit à côté d'elles. Nos hommes, ils ne reviendront
donc jamais ?
L'avis du
webmaster : Ce qui frappe d'abord, chez Giono, c'est la
langue, faite d'argot de Provence et de pure poésie,
familiarité quasi-lyrique qui vise juste et touche au plus
profond. Point de grand faits de guerre, ici, point d'histoire
militaire qu'il faut réciter la main sur le coeur. La vie et la
mort, simplement. La vie malgré tout, que même la guerre ne
peut totalement anéantir. Dans son réquisitoire, Giono nous
fait partager, chose assez rare pour l'époque, des morceaux
d'existences sur le front et à l'arrière, mis bouts à bouts
dans un ordre qui semble chronologique. Deux unités de lieux :
les collines, vidées de leur jeunesse et de leur force, et le
front, immense et indistingué, où sont venus se perdre et
mourir les hommes. Ces deux zones narratives s'opposent
constamment : la campagne chaude et verdoyante, quoique privée
de sa substance essentielle, est mise en parallèle avec le No
Man's Land cauchemardesque des champs de bataille, noir,
bourbeux et peuplé de cadavres et de rats. La vie, même
vacillante, contre la mort, qui ne faiblit jamais. Giono nous
place d'emblée dans la position du témoin direct de toutes ces
victimes de la guerre, sans distanciation ou presque. A tout
moment, nous sommes au coeur de l'action, séparés des
personnages par la barrière fragile d'un narrateur à peine
omniscient, qui n'arrange rien, ne ménage pas son lecteur, mais
qui parvient, malgré tout, à le faire espérer.
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