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Titre : La pitié dangereuse

Auteur : Stefan Zweig

Date de publication : 1939

Genre : roman

Critique publiée sur le site le : 19 janvier 2003 

 

La pitié dangereuse fut le seul roman de Stefan Zweig. Ecrit à la veille de la Seconde guerre mondiale, il nous présente, d'une part, le portrait d'une petite ville autrichienne en 1913, et d'une façon plus large, celui de l'Autriche toute entière peu avant la chute de l'Empire austro-hongrois, dont la capitale est encore à l'époque un carrefour de civilisations et de cultures.

Il évoque aussi, et c'est ce qui compose l'intrigue principale de l'oeuvre, le cas presque pathologique d'un jeune officier Autrichien victime de sa pitié pour une jeune femme paraplégique. Ce sentiment que l'on présente habituellement comme une vertu (la miséricorde chrétienne), devient ici le rouage essentiel du drame. 

Grand ami de Freud, Stefan Zweig s'est toujours efforcé  de développer dans son oeuvre l'aspect psychanalytique des personnages et des situations, qui devient souvent ainsi l'élément essentiel de l'intrigue, au-delà de toute considération d'ordre historique. Le joueur d'échecs, par exemple, dépeint les souffrances et les traumatismes d'un homme qui, ayant été capturé par les nazis, vécut dans un isolement total, privé de tous les objets qui composent notre existence d'être humain : une table, une chaise, un livre, du papier, un stylo. La geôle dans laquelle il est maintenu devient alors un véritable terrain expérimental : privé de toutes ces choses qui contribuent à nourrir et entraîner son esprit, qu'adviendra-t-il de cet homme ? Quels changements pourrons-nous constater en lui ? 

Pour son seul et unique roman, Zweig décrit les étapes d'une autre expérience : confronter un jeune homme au coeur tendre à la misère humaine, et lui donner les moyens de la soulager, au moins partiellement, au prix du douloureux sacrifice de sa propre existence sentimentale. Quel sera le choix de notre héros ?

"Il y a deux sortes de pitié. L'une, molle et sentimentale, qui n'est en réalité que l'impatience du coeur de se débarrasser le plus vite de la pénible émotion qui vous étreint devant la souffrance d'autrui, qui n'est pas du tout la compassion, mais un mouvement instinctif de défence de l'âme contre la souffrance étrangère. Et l'autre, la seule qui compte, la pitié non sentimentale mais créatrice, qui sait ce qu'elle veut et est décidée à persévérer jusqu'à l'extrême limite des forces humaines." (La pitié dangereuse, prologue)

L'histoire : En 1913, dans une petite ville de garnison autrichienne, Anton Hofmiller, jeune officier de cavalerie, est invité dans le château du riche Kekesfalva. Au cours de la soirée, il invite la fille de son hôte à danser, ignorant qu'elle est paralysée. Désireux de réparer sa "gaffe", Anton, pris de pitié pour l'infirme, multiplie bientôt ses visites. Edith de Kekesfalva cache de plus en plus mal l'amour que lui inspire le bel officier, qui lui ne s'aperçoit de rien, jusqu'au moment où il sera trop tard. Car est dangereuse la pitié "qui n'est en réalité que l'impatience du coeur de se débarrasser le plus vite possible de la pénible émotion qui vous étreint devant la souffrance d'autrui".

L'avis du webmaster : Il s'agit sans aucun doute de la plus belle oeuvre de Stefan Zweig. L'originalité du thème, la complexité des personnages, le déroulement impitoyable du drame jusqu'à son dénouement inévitable font de ce roman un chef-d'oeuvre incontestable, tantôt émouvant, tantôt dur et cruel. On y découvre également la peinture nostalgique d'une civilisation bientôt morte et condamnée par l'histoire.

L'oeuvre de Stefan Zweig ne se laisse pas oublier. Dérangeante par la vision qu'elle donne de l'âme humaine, de ses faiblesses que l'on veut déguiser en vertus, elle nous poursuit bien après avoir achevé sa lecture. Et si l'on veut être honnête avec soi-même, il n'est pas possible de ne pas compatir aux tourments de ce jeune officier, et de partager avec lui ses indécisions et ses erreurs.

Un roman ambigu et puissant, qui frappe par son intelligence et la justesse de son analyse.

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Ils ont donné leur avis !

Isabel, 23 ans, Monaco

J'ai lu ce roman en allemand il y a des années et j'étais toute contente d'avoir enfin trouvé la version française. Il n'y a pas un seul livre qui m'aurait marqué comme ceci. L'histoire fait réfléchir, le langage poétique de Zweig fait rêver. Et l'ensemble fait qu'on n'oubliera jamais ce roman.

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